La puissance de l’immatériel
Pour changer le monde, ou créer un monde nouveau, il n’est pas sûr que les méditations globales soient une bonne solution. Je pense qu’elles fonctionnent bien lorsqu’elles ont un objectif précis et bien spécifique, comme enrayer une épidémie ou réduire les accidents ou la criminalité dans une ville. Mais pour changer le monde, il y aurait tellement de choses à changer que même si on faisait tous les jours pendant un an une méditation globale sur un sujet spécifique différent, on n’arriverait pas au bout. Et ce serait beaucoup trop complexe et trop contraignant. Le sujet de méditation ferait mieux d’être le nouveau monde dont on rêve. À moins de rester très général, trop général, ce serait très difficile à définir précisément, car chacun a un rêve un peu différent, et un rêve qui change, qui évolue avec le temps. Il est donc bien difficile d’organiser quelque chose de global, et il vaudrait mieux que chaque personne, chaque petit groupe, fasse sa méditation comme il l’entend. En plus, au lieu de se limiter à une seule vision de ce que serait un nouveau monde, on obtiendrait une vision globale beaucoup plus vaste et plus complète qui comprendrait et unirait toutes les différentes visions individuelles.
Le besoin de s’unir et de créer des organisations globales (comme les institutions internationales) est une caractéristique du monde matériel où la valeur quantitative prime toujours sur la valeur qualitative, car la croyance dominante est que nous sommes tous des êtres séparés, donc très vulnérables, qui ont besoin de s’unir pour se sentir plus forts et trouver une sécurité imaginaire. Sur le plan immatériel, le plan spirituel, nous sommes déjà unis, car nous sommes tous des cellules d’un grand tout, qui, lui, est invulnérable. La notion de quantité disparaît alors au profit de celle de qualité. La qualité de l’ensemble, de l’humanité, de la société, du monde, dépend de la qualité de chacun des individus qui les composent. Et la qualité, ici, c’est le niveau de conscience. Si chacun, chaque groupe, travaille à l’élévation de son niveau de conscience, celui de l’ensemble s’élève automatiquement, même s’il n’y a aucun lien entre les individus ou les groupes au niveau matériel. An niveau immatériel ou spirituel, l’interrelation, malgré les distances, est spontanée et immédiate, comme l’intrication quantique, car elle transcende l’espace et le temps. Et, à ce niveau-là, des sauts quantiques sont possibles lorsque certains seuils sont atteints, et je pense qu’il s’agit de seuils qualitatifs plutôt que quantitatifs.
En conséquence, ce qui est important, c’est la qualité, l’intensité, de notre pratique et de notre contribution. D’une part, au niveau spirituel, la qualité de notre méditation, de nos pratiques, de nos prières, de nos visualisations, de nos intentions, en s’unissant à celles de tous les autres, va créer un égrégore qui synthétisera tous les rêves individuels afin de manifester un nouveau monde matériel. Au niveau matériel, de nos actions, de nos paroles et de nos interventions dans le monde, et en particulier les livres, les articles, les vidéos, c’est aussi la qualité qui compte plus que la quantité. Avoir des milliers ou des centaines de milliers de lecteurs ou d’auditeurs a une importance relative, qui n’est pas négligeable, mais dont l’effet sur le niveau de conscience des personnes concernées dépend uniquement de la qualité des messages. Les messages des médias mainstream, qui touchent des millions de personnes, font baisser leur niveau de conscience. Si nos pensées, nos paroles et nos actions sont perceptibles par nos sens au niveau matériel, et que tous les messages que nous postons sur les réseaux sociaux sont enregistrés sur les mémoires des GAFAM, elles existent aussi au niveau immatériel, où elles sont enregistrées dans l’inconscient collectif de l’humanité et dans les annales akashiques, des mémoires dont la durée de vie et la disponibilité ne sont pas limitées par les capacités des technologies actuelles.
Ainsi, même si le contenu d’un texte ou d’une vidéo, sur le plan matériel, ne va toucher que quelques dizaines de personnes sur lesquelles il va avoir un impact, sa diffusion est infinie sur le plan immatériel et englobe tout l’univers. Mais cela, nous ne le percevons pas et nous n’avons pas d’outils pour quantifier les impacts, comme nous avons le nombre de vues sous une vidéo YouTube, qui semble nous donner une information qualitative ; et les gens vont être enclins à regarder une vidéo qui aura un million de vues plutôt qu’une qui n’aura que 25 vues. C’est comme ça que fonctionnent la plupart des gens, et le monde actuel. Et on voit bien que ce système de société capitaliste, qui recherche la quantité, et croit qu’elle est illimitée dans l’espace limité de la Terre, ne marche pas. Nos systèmes de société dysfonctionnels datent de quelques siècles ou de quelques millénaires, et même si, dans son ignorance, l’homme les considère comme l’apex de la création, ils ne marchent pas, c’est de plus en plus évident. Mais la création ne se limite pas au monde humain et à ses créations technologiques. L’univers, la Terre, la nature ne sont pas des créations humaines, ils existent depuis des millions ou des milliards d’années, et leur manifestation matérielle n’est qu’un aspect limité, dans l’espace et dans le temps, de leur existence, qui est immatérielle. Si on ne peut pas mettre de compteur sur l’immatériel, on voit les effets des actions immatérielles sur le long terme, comme la pérennité de la vie, que l’homme n’est pas encore parvenu à détruire, et il n’y parviendra jamais ; car la puissance de l’immatériel est incommensurable, et invincible aux gadgets technologiques et bassement matériels des hommes. La spiritualité est ce qui nous permet de rentrer en contact avec l’immatériel, et de percevoir la vraie nature de la réalité, et de ses infinies potentialités. Si nous élevons notre niveau de conscience, c’est un de ces mondes potentiels, plus lumineux et plus harmonieux que le monde actuel, que nous pouvons créer et dans lequel nous pourrons vivre.
1er juillet 2022, Chiang Mai